
La question à laquelle cet ouvrage entend répondre est la suivante : comment expliquer que, lors de ce qu’on appelle la Révolution tranquille, l’Église n’ait opposé aucune résistance au démantèlement de son œuvre ( en éducation, en soins de santé, en travail social ) ? Non seulement l’Église n’a pas résisté à passer le témoin à l’État en ces domaines, mais elle a participé avec enthousiasme à son propre effacement, si bien que, en quelques années, ses effectifs ont été radicalement réduits et son influence spirituelle profondément diminuée.
Si cela a pu se produire, soutient Francis Denis, c’est sans doute que le terrain pour cette passation des pouvoirs était déjà préparé depuis longtemps, au sein même de l’Église. Sa réflexion consistera donc à rappeler ou à faire apparaître les formes qu’ont prises, au Québec, les relations entre l’Église et l’État depuis les débuts de la Nouvelle-France jusqu’à l’époque du concile Vatican II pour essayer de voir comment les conditions de possibilité de la « chute » de l’Église dans les années 1960 se sont mises en place.
Mais cette chute n’en a pas été vraiment une. L’Église québécoise s’était en effet déjà appropriée depuis longtemps la mission utopique séculière d’une « cité de Dieu » sur terre ( là où sa mission aurait dû rester de nature spirituelle ), mission que l’État n’a fait que récupérer et prolonger : l’utopie messianique n’a fait que changer de main dans une parfaite continuité idéologique. La « révolution tranquille », en réalité inutile, n’a pas eu lieu.
Cette réflexion forte et ample est d’abord caractérisée par l’originalité du point de vue ( théologique ) sur l’histoire. Mais son argumentation soutenue et sa démonstration convaincante ouvrent surtout à un salutaire renouvellement du regard sur l’histoire du Québec et l’idéologie qui l’anime.
Introduction • 1 : Un portrait incomplet • 2 : Un changement de perspective • 3 : La sécularisation comme matrice herméneutique • 4 : Les racines théologiques de la sécularisation • 5 : Penser l’histoire de l’Église au Québec • 6 : La survivance dans le cadre ultramontain de Mgr Bourget ( 1840-1870 ) • 7 : L’ultramontanisme utopique de Mgr Louis-François Laflèche ( 1870-1898 ) • 8 : Les mutations de l’ultramontanisme utopique ( 1900-1930 ) • 9 : Variations sur fond de crise ( 1929-1939 ) • 10 : L’horizon personnaliste ( 1939-1949 ) • 11 : Les nouveaux avatars de l’inertie ( 1950-1960 ) • 12 : La grande métamorphose ( 1960-1970 ) • 13 : Une renaissance avortée ( 1968-1975 ) • Conclusion
Francis Denis a une formation universitaire en philosophie et en théologie. Aujourd’hui vidéo-journaliste et réalisateur spécialisé en matière religieuse, il a récemment réalisé les documentaires Post Mortem, une analyse critique de la gestion pandémique en collaboration avec Libre Média, ainsi qu’Au rythme du cœur, sur l’abbaye Saint-Benoît-du-Lac, pour Sel + Lumière Média. On peut notamment le suivre sur francisdenis.com.