Il ne fait pas de doute que le corps occupe une place centrale dans les préoccupations de notre époque. La science biochimique en fouille et en maîtrise les mécanismes les plus secrets, la technique médicale en propose les pièces de remplacement en cas de défaillance, les pratiques socioculturelles en exploitent et en perfectionnent les ressources. Dans toute cette attention, le corps apparaît comme un objet parmi d'autres, une machine analysable, remplaçable, exploitable, perfectible. Mais où se situe dès lors la subjectivité — pour ne pas dire l'âme ou l'esprit — dont chacun de nous fait spontanément et intimement l'expérience comme quelque chose de singulier et d'unique? Quelle est la part qu'y prend le corps? Depuis que la philosophie moderne, Descartes en particulier a séparé «res cogitans» et «res extensa», l'identité de l'homme semble déchirée, fissurée, en tout cas problématique. Ce sont quelques-unes des figures, historiques aussi bien que thématiques, de ce rapport problématique entre matière — notre propre matière — et esprit que décrivent les collaborateurs de ce collectif.
Léo-Paul Bordeleau a été professeur au département de philosophie et à l'école des sciences de l'activité physique de l'université d'Ottawa. Chez Liber, il a codirigé, avec Sébastien Charles, Corps et science. Enjeux culturels et philosophiques (1999).