Sur le divan de l'analyste, le sujet parle, raconte, se tait. Mais que faut-il entendre? Et qui le dira? On pense souvent que c'est l'inconscient qui laisse ainsi couler des symptômes grâce auxquels le thérapeute de l'âme reconstruira la structure profonde d'une vie et calmera ainsi l'angoisse de celui qui voulait comprendre — lui-même, sans doute, en premier lieu. La vision est rassurante, mais elle est loin de satisfaire. Pour essayer de saisir ce qui se joue dans la cure, il faut s'arrêter à ce qui s'y dit. Et à partir du moment où le récit, comme forme privilégiée de la parole de l'analysant, devient un facteur décisif dans la compréhension de la réalité psychique, il convient de s'interroger sur les conditions formelles du processus et sur la singularité de la pratique analytique. Cet essai est donc une réflexion sur la notion de récit en psychanalyse. On ne s'étonnera pas de la place qu'y occupe la littérature. Non que la littérature corresponde exactement au processus de la cure. Mais dans la mesure où elle donne matière à penser, elle permet d'étudier les formes complexes de fictivité qui configurent la trame du récit.
Simon Harel, écrivain et essayiste, est professeur titulaire et directeur du département de littérature comparée de l'université de Montréal, où il dirige le Laboratoire sur les récits du soi mobile. Il a été professeur au département d’études littéraires de l’université du Québec à Montréal de 1989 à 2011. Aux éditions Liber, il a codirigé L’étonnement (2000), L’infigurable (2000) et dirigé Résonances (1998). Il a également publié La démesure de la voix et signé les textes accompagnant les dessins d'Alain Médam dans Le regard long.